L’imposition de la valeur locative

L’imposition de la valeur locative est pour l’instant maintenue. Son éventuelle suppression serait-elle une bonne chose ? Quelques éléments pour s’en faire une opinion !

Actualité politique sur la question

Au courant des années 2016 et 2017, deux initiatives parlementaires visant l’abrogation de l’imposition de la valeur locative, avec une éventuelle suppression de la déductibilité des coûts immobiliers (intérêts passifs hypothécaires et des frais immobiliers d’entretien), avaient été déposées au Conseil national et au Conseil des Etats. Pour une des initiatives, la commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-CE) va se mettre à rédiger un projet de loi concrétisant son initiative déposée auprès du Conseil des Etats. Le débat sur la suppression de la valeur locative occupera donc à nouveau notre parlement et l’opinion publique dans un futur relativement proche.

A cet égard, nous vous proposons d’apporter quelques éclaircissements sur le sujet.

Le système actuel et ses limites

Sous le système fiscal actuel, la valeur locative est considérée comme un revenu (de fortune immobilière) en nature, ayant une valeur économique correspondant au loyer que le propriétaire pourrait obtenir en mettant son bien immobilier en location. Les frais liés à l’entretien de l’immeuble peuvent être portés en déduction de la valeur locative, à titre de frais d’acquisition du revenu. Les intérêts de la dette hypothécaire sont également déductibles fiscalement, au titre des déductions générales, dans les limites posées par le droit fiscal.

Compte tenu de la déductibilité des intérêts passifs, les opposants au système actuel avance qu’il inciterait les ménages privés suisses à contracter des emprunts hypothécaires et donc à augmenter l’endettement des ménages suisses qui est très élevé en comparaison internationale. De plus, un bon nombre de propriétaires ayant contracté un emprunt hypothécaire avait choisi par le passé de procéder à un amortissement indirect de celui-ci afin que la fortune immobilière nette n’augmente pas, ce qui est fiscalement favorable au regard de l’impôt sur la fortune (lequel frappe la fortune nette). Au contraire, avec un amortissement direct de la dette hypothécaire, la fortune immobilière nette augmente annuellement, au gré des remboursements de ladite dette, augmentant ainsi la fortune nette imposable.

D’un point de vu plus juridique, il est souvent contesté de justifier l’imposition de la valeur locative pour des raisons d’égalité entre propriétaires et locataires. Il est fort probable que ce soit sur cette base que bon nombre de propriétaires occupant leur logement et ayant remboursé leur emprunt hypothécaire, du moins une bonne partie de ce dernier, ressentent un sentiment d’injustice car ils doivent déclarer un revenu fictif, alors que leur situation peut devenir difficile au moment de leur retraite.

Suppression pure et dure de la valeur locative (selon son système actuel) et Stratégie Energétique 2050

Lors de la votation fédérale du 21 mai 2017, le peuple suisse a accepté la sortie du nucléaire en accueillant favorablement la Stratégie Energétique 2050 (Loi fédérale sur l’énergie – LEne).

Une des mesures visant à accroître l’efficacité énergétique concerne les incitations fiscales pour les rénovations énergétiques des bâtiments. Les investissements effectués dans des rénovations énergétiques de bâtiments sont déjà déductibles au regard de l’impôt sur le revenu. Avec la LEne, les frais de démolition liés aux nouvelles constructions de remplacement sont désormais aussi déductibles. Les coûts d’investissement énergétiques et les frais de démolition précités sont dorénavant également déductibles pendant les deux périodes fiscales suivantes dans la mesure où ces dépenses ne peuvent pas être prises en compte fiscalement l’année où elles ont été effectuées.

Sur la base de ce qui précède se pose la question du sort des incitations fiscales précitées en cas de suppression pure et dure du système actuel d’imposition de la valeur locative, c’est-à-dire avec la suppression des coûts immobiliers. Seraient-elles néanmoins maintenues compte tenu de l’objectif visé par la Stratégie Energétique 2050 ou suivront-elles le sort des frais d’entretien immobilier usuels, dont la déduction fiscale ne serait plus admise ?

Conclusion

Il ressort de ce qui précède que la prise de position n’est pas aisée, tant les arguments pour le maintien que pour la suppression de la valeur locative sont pertinents, étant souligné que d’autres en sont avancés tant par les partisans du maintien que par ceux en faveur de la suppression de l’imposition de la valeur locative.