Excessive salary: when the tax authorities interfere in the remuneration of the shareholder-employee!

While significant latitude is given to the employer to set the remuneration of its employees, this latitude is not unlimited when the employee is also a shareholder. (Article in French)

En effet, si la rémunération de l’actionnaire-employé n’est pas conforme à ce qui se fait d’ordinaire sur le marché, le fisc pourrait être tenté d’investiguer sur les motifs ayant mené à la fixation d’une telle rémunération. La relation actionnaire-employé avec la société devient ainsi « suspecte ». Le salaire étant une charge déductible pour l’entreprise, lorsque celui-ci est excessif, il constitue potentiellement, et au moins en partie, une charge non-justifiée.

Nous vous proposons de passer en revue les concepts clés du salaire « excessif ».

Le principe du salaire « excessif »

Dans la mesure où vous êtes salarié(e) et actionnaire (ou proche d’un actionnaire) de votre propre entreprise, le fisc peut considérer que votre salaire est « excessif » si ce dernier s’écarte de manière notable du salaire de marché. La question qui se pose est la suivante : « Cette rémunération aurait-elle pu être versée à un tiers non-actionnaire exerçant cette activité dans les mêmes circonstances ? ». Dans le cas contraire, la part jugée « excessive » est requalifiée au niveau fiscal en une distribution de dividende. Par conséquent, cette part est réintégrée au bénéfice imposable de votre entreprise conduisant, dans la plupart des cas, à une hausse de l’impôt sur le bénéfice et pouvant également avoir des implications en matière d’impôt anticipé, d’assurances sociales et d’impôt sur le revenu pour l’actionnaire.

La détermination du salaire « excessif »

Pour déterminer si un salaire est « excessif », il faudrait le comparer avec le marché. C’est-à-dire vérifier si, dans des circonstances identiques, une société verserait le même salaire à son employé si celui-ci n’était pas actionnaire. Evidemment, ce genre d’étude est difficile à mener et le fisc, à défaut d’étude de marché détaillée, se base, en principe, sur la méthode dite « valaisanne ». Cette méthode a pour objectif de fixer le salaire maximal admis pour l’actionnaire au niveau fiscal. Cette méthode n’est évidemment pas la seule applicable mais constitue une base solide et de pratique constante. Ce salaire se compose ainsi d’une part fixe et d’une part variable.

La part fixe peut être déterminée en particulier sur la base du calculateur de salaire national du SECO tenant compte notamment de critères comme le secteur d’activité de l’entreprise, l’âge, la formation, la fonction et la durée de travail de l’employé.   

La part variable se compose d’une participation au chiffre d’affaires et d’une part au résultat de l’entreprise durant l’année concernée. La participation au chiffre d’affaires se calcule par palier, soit 1% du chiffre d’affaires jusqu’à 1 million, 0,9 % du chiffre d’affaires entre 1 et 5 millions et 0,8% du chiffre d’affaires au-delà de 5 millions. Ces pourcentages sont doublés si l’entreprise opère dans le secteur des services. Enfin, la part au résultat est égale au tiers du résultat pour les entreprises employant moins de 20 collaborateurs et au quart du résultat pour celles employant plus de 20 collaborateurs.

Ces trois éléments additionnés permettent ainsi de déterminer le salaire justifié commercialement qui, aux yeux du fisc, devrait pouvoir être déduit du bénéfice de la société. En cas de versement de salaire supérieur, la différence ne pourra s’expliquer que par la relation d’actionnariat et sera ainsi requalifiée en dividende non-déductible pour la société.

La méthode valaisanne, une méthode peu flexible

Comme évoqué plus haut, la méthode valaisanne est une méthode mathématique qui offre peu de flexibilité, notamment sur la partie variable du salaire. Elle n’est donc pas forcément représentative de la réalité de l’entreprise, de son marché et de la rémunération qui en découle pour son employé-actionnaire. Le fisc applique toutefois cette méthode de façon quasi-systématique et il n’est pas nécessairement aisé pour le contribuable ensuite de défendre sa position.

Si le contribuable est en mesure de démontrer que des salariés non-actionnaires se trouvant dans la même situation (ex : critères mentionnés ci-dessus) perçoivent des rémunérations équivalentes, le contribuable en question devrait être tiré d’affaire. Toutefois, en pratique, il est particulièrement complexe dans la majorité des secteurs d’activité d’être en mesure de trouver et de soumettre au fisc des comparaisons.

Quelques pistes pour éviter le salaire « excessif » de l’actionnaire-employé

Comment faire alors pour éviter de se retrouver dans la situation où le fisc s’intéresse de près à la rémunération pratiquée par la société envers ses actionnaires-employés ? Il convient de préciser ici que le fisc ne vérifie pas systématiquement le salaire de chaque actionnaire-employé. Il doit donc y avoir quelque chose qui attire son attention sur la possibilité qu’une rémunération puisse être excessive. Nous parlons ici concrètement du montant de la masse salariale de la société en général et du salaire de l’actionnaire ensuite. Le fisc possède une base de données évidemment importante en matière de masse salariale constituée par l’ensemble des contribuables et des certificats de salaire émis. Il peut ainsi relativement rapidement détecter les « anomalies ».

La première solution est assez évidente et consiste à éviter les écarts salariaux importants au sein de la société elle-même entre les employés « ordinaires » et le « patron » lorsque ceux-ci ont des positions relativement similaires. Si tous les employés sont traités de la même manière, la notion de rémunération excessive est plus difficile à soutenir.

Ensuite, l’actionnaire-employé a la possibilité de justifier sa rémunération qui peut paraître importante voire excessive avec des comparables comme le salaire d’un précédent employeur, d’un concurrent ou autre moyen de preuve.

Enfin, se pose également la question de la structure de la rémunération de l’actionnaire entre son salaire et le dividende. Il peut être opportun d’analyser l’équilibre optimal entre les deux au regard des possibilités, des besoins et de la charge fiscale globale que cela représente pour la société mais également pour l’actionnaire. N’oublions pas que même après l’entrée en vigueur de la réforme fiscale (RFFA), la taxation des dividendes chez l’actionnaire reste favorable par rapport à la taxation applicable au revenu du travail.

Conclusion

La politique salariale pour l’actionnaire-employé doit être étudiée de manière approfondie afin de réduire le risque d’une reprise au titre de salaire « excessif ». Afin d’éviter un tel cas, il est judicieux de déterminer le juste équilibre entre salaire et dividende pour l’employé-actionnaire, mais également de maintenir une certaine logique dans la rémunération de tous les employés entre eux.

La méthode valaisanne, habituellement appliquée par le fisc, constitue un bon point de départ à cette analyse et permet de déterminer relativement rapidement un salaire « défendable ». De là, il est possible de construire une rémunération sous forme de salaire et de dividende qui soit acceptable fiscalement et ainsi réduire le risque de requalification.

Article rédigé par Deborah Joye et Quentin Eiselé